Les relations familiales ne sont pas toujours heureuses comme ce que les clichés sociaux aimeraient faire penser. Elles sont parfois toxiques. Comment en sortir ? Comment affronter le pire : le viol, l’inceste ? Et surtout : continuer de vivre coûte que coûte.
Les liens familiaux nocifs : des relations qu’on ne choisit pas et qu’on ne peut pas couper facilement
La famille n’est pas toujours un cadre heureux où s’épanouir. Lorsque les liens familiaux sont nocifs, notamment dans les rapports parent-enfant, la souffrance est plus vive qu’avec d’autres relations. Et dans ces situations, l’impression d’être pris au piège et de subir le jugement de la société peuvent être plus grands.
Lien maternel ou filial nocif
Le rapport parent-enfant et surtout le lien mère-enfant est idéalisé en tant que relation positive et heureuse. Et si ce lien familial était nocif ? Une mère n’est pas toujours bienveillante envers son ou ses enfants. La réciproque est vraie aussi. Mes héros de “La chute et l’envol” ont tous ce point commun d’être parties prenantes dans une histoire familiale compliquée.
Quand une relation toxique se met en place entre des personnes qui n’ont pas de lien familial, c’est déjà très compliqué. Mais quand celui-ci se développe dans un cadre maternel ou filial : comment le rompre ? Les relations entre un parent et son enfant dans lesquelles se mélangent amours et reproches, affection et ressentiment, donnent un curieux résultat. Difficile de couper les ponts, pas simple de seulement passer à autre chose, impossible d’oublier.
Rompre des liens familiaux nocifs
Les individus sont souvent définis en fonction de la famille dont ils sont originaires : le métier des grands-parents, la région d’origine. C’est une partie de nous qui est décrite quand on donne son nom de famille, lorsqu’on parle de ses parents, de ses aïeux.
Puisque notre famille c’est un peu le prolongement de notre identité, d’où on vient, qui on est, couper les ponts avec une famille nocive c’est risquer de couper avec soi même. Mes héros font le choix de partir loin mais ce n’est pas si facile que de laisser son passé (et la famille qui va avec) derrière soi. Parce que c’est une partie de soi, même si c’est la partie meurtrie, qu’on abandonne en plaquant la famille toxique.
Le poids supplémentaire de la culture et de la société
La société nous fait grandir avec des clichés angéliques de la mère aimante, de l’enfant heureux au milieu des siens, de la famille bienveillante. On subit tous, plus ou moins consciemment, ces stéréotypes culturels qui sont presque une injonction à aimer ses proches et à être heureux avec eux.
Quelle double peine pour ceux qui subissent des liens familiaux toxiques ! Le jugement social vient s’ajouter aux difficultés affrontées dans sa famille. Mauvais parent. Mauvais enfant. L’échec et la responsabilité est forcément supporté par celui qui paraît en souffrir le moins. Cependant, derrière ces relations qui ne peuvent être rompues pendant des années, il y a beaucoup de temps pour développer des liens toxiques, implanter ces venins relationnels qui resteront longtemps nocifs.
Comment construire sa vie après ou avec des liens familiaux nocifs ?
Pour vivre avec un lourd passif familial, il y a plusieurs options. On peut fuir et quitter toute relation familiale nocive. Il est également possible de ne rien faire, subir et traîner son fardeau coûte que coûte. La dernière option est d’affronter la ou les relations toxiques.
Couper les ponts
Mes héroïnes envoient souvent tout balader ! Contrainte par les événements, pour TÍn. Volontairement, pour Anita ou Salomé. Le point commun : un nouveau départ les attend après avoir laissé derrière elles une situation compliquée. Dans “La chute et l’envol”, Anita part à des milliers de kilomètres pour tenter d’oublier ses liens familiaux nocifs.
Le nouveau départ donne du souffle, une forme de renaissance à mes héroïnes. Pourtant, quand le passé fait souffrir, ce n’est pas la présence physique le problème… Et malheureusement, les relations tragiques laissent des traces et la mémoire s’emporte partout avec soi. Même en changeant de continent, les douleurs passées restent.
Traîner son boulet mental
L’autre option pour vivre avec des relations familiales toxiques ou leur souvenir est justement de vivre avec. Certaines de mes héroïnes traînent leur passé comme un boulet à leur pied. Notamment Amélie, dans “Amoureuse d’un connard”, tente d’aller de l’avant dans sa vie sans avoir fait le deuil de son passé. Et c’est bien trop fragile qu’elle se lance éperdument dans une liaison impossible.
Nos cerveaux ont des capacités incroyables. Comme celle de se souvenir d’éléments traumatiques avec une grande précision. Malheureusement pour mes héros de “La chute et l’envol”, sans changement dans les liens familiaux toxiques, les raisonnements, les regrets et les culpabilités restent intacts.
Crever les abcès des liens familiaux nocifs
Pour rompre les chaînes des boulets aux pieds de mes héros, il reste la solution de l’affrontement. Faire face à ses souvenirs pour voir réellement la source de ses souffrances. Tenir tête à ses démons pour enfin pouvoir les laisser derrière soi.
Crever les abcès est la troisième solution pour sortir de liens familiaux nocifs. Cette option est difficile quand on a opté d’abord pour la fuite. Mes héros de “La chute et l’envol”, malgré des vies et des passés très différents, ont en commun d’avoir la possibilité de se retourner sur leurs situations. Et comme dans beaucoup d’histoires de vie, il est rarement trop tard pour avouer des torts, révéler une vérité ou renouer des liens.
Agression intra-familiale et paroxysme des liens familiaux nocifs
Quand on combine la thématique du viol et celle des familles toxiques, l’inceste arrive comme la thématique capable de cumuler les horreurs. Et au-delà des agressions, le silence et la mémoire viennent ajouter de la souffrance aux traumatismes.
Le viol : un sujet multi-facettes
Oui, c’est un sujet récurrent dans mes romans, le viol ou la tentative de viol. C’est peut-être l’angle le plus évident quand on parle de violence et des rapports entre les hommes et les femmes. Je l’ai déjà traité de plusieurs façons et je ne suis pas sûre que je vais m’arrêter là (spoiler : non, je ne m’arrêterai pas là !).
Elle prend la forme d’une agression pure et simple à laquelle Amélie échappe dans “Amoureuse d’un connard”. C’est l’évocation d’un trafic d’enfants dans “Salomé”. Dans “La chute et l’envol”, il est abordé via l’inceste ou le viol dans un contexte politico-terroriste. Dans tous les cas, les circonstances varient mais les victimes sont toujours bafouées. Elles obtiennent rarement justice.
Inceste
On touche du doigt le pire quand on combine les deux sujets précédents : viol et lien familial nocif. Aborder le sujet de l’inceste c’est à la fois évoquer la violence envers les femmes et l’appropriation de leurs corps par leurs agresseurs. Mais c’est aussi placer ces violence dans un contexte familial, là où l’on est censé être en sécurité.
Quand la famille devient l’opposé de ce qu’elle devrait être : le lieu de tous les dangers plutôt qu’un cadre idéal et protecteur. Dans “La chute et l’envol”, ces sujets sont aussi le prétexte d’évoquer la difficulté de sortir de ces situations et des souvenirs qu’elles créent. Enfin, le viol intra-familial c’est aussi la double peine pour les victimes avec le poids du silence qui peut s’installer. Quand l’omerta s’impose auprès de proches, ce n’est pas simple de libérer la parole avec des inconnus.
La mémoire : calvaire de victime
Au-delà des agressions, j’aborde une nouvelle fois le sujet de la mémoire. Avec Anita, comme avec mes autres héros et héroïnes, c’est la perpétuation de la souffrance à travers les souvenirs des agressions (ou des autres traumatismes) que je relate. Quand un viol n’aura duré que quelques minutes, combien d’années sont réellement volées aux victimes ?
“La chute et l’envol” évoque ce sujet de l’emprisonnement mental et des douleurs consécutives à des liens familiaux nocifs. Mes personnages doivent trouver des issues à ces souvenirs provocateurs de souffrance s’ils veulent accéder à la vie dont ils rêvent. Pas simple. Mais ils ne sont plus isolés face à leurs calvaires respectifs.
L’histoire d’Anita, mais aussi celle de Salomé, permettent d’aborder les agressions, les relations toxiques, et une certaine vision de la justice. Quand si peu de viols sont condamnés, peut-on imaginer trouver une issue autrement ?
On en parle ? Si vous avez lu “La chute et l’envol”, qu’en pensez-vous ?